Alain Badiou

Publié le par bernard.fortin.over-blog.com

Alain Badiou

p. 105

Second manifeste pour la philosophie

7

Subjectivation

Nous supposons maintenant l’existence d’un corps de vérité tel qu’il se constitue autour d’un énoncé primordial, lui-même trace d’un événement disparu.

 

Quant à moi, l’artiste, je déduis que : n’est-ce pas convoquer (j’emploie ce mot à A. Badiou) un conglomérat subjectif qui nous restitue, après une visitation de Platon, le monde des idées en tant que vérité associative et contradictoire mais entièrement dégagée de toute dualité. C’est une pensée qui émerge avec la volonté nécessaire à la mise en acte ; celle de la politique. C’est l’événementiel qui émerge et qui n’a aucune durée de vie autre que celle de laisser une trace dans nos mémoires. Nous prenons acte. En art, nous fabriquons des objets qui ont une durée de vie particulière. En philosophie, s’il n’est pas possible d’analyser à partir d’un regard la chose présente devant nous, elle nous contraint par réflexivité à la réflexion d’un présenté là pour nous dire ce qu’il en est. Mais, chacun à sa manière d’interpréter, voire de juger ce qui nous est destiné comme résultante scénique pour nous faire réagir et nous conduire vers un réactif de la pensée.

 

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Entretien avec Alain Badiou (1) : Qu'est-ce qu'une vérité ?


[jeudi 27 mars 2008 - 15:00]

Alain Badiou : Pour faire cet exercice de situation, il faut se référer à des orientations. Si on prend la philosophie du XXe siècle, à voir les choses en gros, on peut y discerner deux courants fondamentaux, qui se sont dessinés dès le début du siècle. Premièrement un courant que j’appellerai vitaliste qui s’origine dans Bergson, mais aussi dans Nietzsche et qui traverse tout le siècle y compris certains avatars existentialistes – il y a un frottement entre les deux. Le représentant le plus significatif en est Deleuze, certainement. De l’autre côté il y a un courant rationaliste et grammairien, appuyé sur la logique, les mathématiques, qui est passé par le Cercle de Vienne mais qui s’est aussi déployé jusqu’à aujourd’hui et dont l’ultime avatar est le cognitivisme contemporain. Je pense qu’il y a eu ces deux-choses là, une tendance qui privilégie dans le fond le temps, la durée, l’existence et puis une tendance qui privilégie le langage et la grammaire.

Si j’avais à me situer, je serais tenté de dire que j’essaie d’être dans un élément qui n’est ni le premier ni le second. Tout deux ont en commun l’anti-platonisme. Le vitalisme existentiel a toujours été anti-platonicien au motif que la pensée de Platon est une pensée des essences, de quelque chose qui surplombe l’existence. Le courant logiciste est également anti-platonicien au motif que pour Platon les objets idéaux qui existaient vraiment et n’étaient pas de simples constructions langagières. Les jeux de langage de Wittgenstein, c’est anti-platonicien, de même que la force du désir et la puissance créatrice de la vie.

Quand je parle d’un "geste platonicien" à propos de ma philosophie, ça veut aussi dire un geste qui sorte de cette dualité, de cette opposition. Et donc je me situerais de ce point de vue là dans une tentative de reconstruire un rationalisme contemporain intégrant ou tenant compte de l’ensemble des dispositions contemporaines dans l’ordre de l’art, de la politique, de la science, etc. mais ne s’inscrivant pas ou tentant de ne pas s’inclure dans la dualité en question.

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L’art nous engage parce que nous voulons être engagés pour démontrer que ce qui est là, n’est pas ainsi. Nous voulons démontrer que c’est en regardant la chose produite à laquelle la montée en puissance l’a rendue telle que nous l’avions placée là, à la portée de notre regard, du rétinien duchampien, pour qu’elle agisse sur notre entendement. Ce qui importe à cette création artistique consiste à évoquer une tension dans notre propre espace de certitude. Produire de l’art, c’est faire quelque chose qui dérangera ce qui est déjà là en place. Mais, qui par réflexivité va nous ramener à la chose quand même, sans pour autant la contempler telle qu’elle est. Elle est devenue autre d’elle-même.

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Alain Badiou

p. 56

Second manifeste pour la philosophie

4

Existence

 

Partons de la question « Qu’est-ce qu’une chose ? ». C’est le titre d’un essai fameux de Heidegger 11. Qu’est-ce qu’une chose en tant qu’un « il y a » sans aucune détermination de son être, excepté précisément son être en tant qu’être ? Nous pouvons parler d’un objet du monde.

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 Il faut lire la suite... Bernard Fortin

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